Tsai Ming-liang offre avec The Hole / Dong (1997) une œuvre d’anticipation mêlant drame et film musical à la veille de l’an 2000. Nous sommes dans une ville taïwanaise ravagée par une épidémie qui touche l’homme. Les autorités y évacuent alors la ville. Pourtant, certains habitants ont décidé de rester. C’est le cas d’un homme et d’une femme vivant dans le même immeuble, l’un étant le voisin du dessus de l’autre.
L’appartement de la femme est submergé par l’eau causée par une fuite. Cette fuite amène un trou dans le plancher de l’un (l’homme) et dans le plafond de l’autre (la femme) créant ainsi un lien entre eux.
The Hole éblouit par la force qu’à son auteur de développer son récit dans un huit clos en raréfiant les dialogues et en minimisant l’action. Tsai Ming-liang enferme ses personnages dans leur appartement respectif ainsi que dans une galerie commerciale désaffectée. De l’extérieur on ne verra rien, le cinéaste taiwanais se focalise sur cet homme et cette femme qu’il contemple en usant de plan-séquence. Il les laisse vivre comme des poissons dans un bocal lugubre où le voisinage lance ses ordures au milieu de la cour. Une pluie de déchets qui fait échos à la pluie qui ne cesse de s’abattre à l’extérieur des bâtiments.
Tsai Ming-liang apporte à son récit les différentes phases d’une relation de voisinage à travers un trou. The Hole vaut également pour le génie qu’à son auteur d’y distiller des scènes de comédie musicale comme une traduction des désirs de ses personnages, des personnages mutiques l’un et l’autre qui ne parviennent à communiquer, et qui exaltent ce manque par l’imagination. Ces moments sont savoureux à contempler, une délectation qui rend l’œuvre singulière et des plus originales.
En définitive, The Hole est une très belle oeuvre qui prend place dans une ville fantôme dont on ne voit que les intérieurs. Toutefois, Tsai Ming-liang parvient à rendre ce sentiment de désertion. Ce couple, il nous le montre comme des êtres seuls et abandonnés à eux-mêmes. Les derniers à vivre dans un amas de béton abandonné au temps grisâtre que la comédie musicale ponctue de couleur. Abandonnés au vide comme s’ils étaient seuls au monde. Des naufragés perdus dans une fin de monde aux allures apocalyptiques.
I.D.
3 commentaires:
Bon souvenir de ce film vu au cinéma. On ressentait presque physiquement le désespoir de cet immeuble grisou et l'humidité qui se rependait partout. A côté de cela les inetrludes musicaux étaient de véritables bouées de sauvetage. Dans mon souvenir, c'est un peu la même chose avec la Saveur de la Pastèque (les scènes chaudes en plus).
Nous avons connu la même immersion alors. J'aime également le contraste saisissant qui existe entre le côté mort d'une vie en vase clos (l'immeuble, ses vies) et les pointes colorés (chants/danses) qui oxygènent l'ensemble.
Aaaah "La Saveur de la Pastèque"... de grands moments salaces. Je ne vois plus les pastèques de la même façon depuis ce jour où je suis tombé sur ce film. Il aura bientôt son billet.
Tres bon film! Je l'ai vu il y a 3 mois seulement!
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