lundi 30 mars 2009

24 city : Entre réalité et fiction

lundi 30 mars 2009
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Avec 24 City (2008), Jia Zhang-ke poursuit son cinéma, celui d’un observateur qui retranscrit les changements sociaux et économiques de la Chine. Observer, comprendre et montrer sont les leitmotive d’un cinéaste qui se fait témoin privilégié d’un présent qui appelle le passé tout en construisant le futur. 24 City ne déroge pas à la règle et s’inscrit tout comme les œuvres précédentes de Jia à l’image de The World (2004), Stil Life (2006) ou plus récemment Useless (2007) comme une œuvre sans concession où son cinéaste fait preuve d’ingéniosité et de persévérance.

Dans 24 City, Jia Zhang-ke nous présente huit portraits au travers d’un docu-fiction. Huit portraits d’homme et de femme qui racontent l’usine 420 du passé, aujourd’hui. En effet, Jia a pris le soin de développer son œuvre aux moyens de témoignages, certains d’entre eux sont vrais, avec pour témoin des ouvriers de cette part de l’histoire chinoise, d’autres fictifs campés par des acteurs. Un melting-pot forcé puisque ces ouvriers portant la parole d’un passé ne peuvent tous témoigner, alors qu’un cinéaste tente de marquer par son œuvre une période à la fois révolue mais témoin d’une profonde souffrance chinoise. Ce pari Jia l’ose au dépend d’une narration et d’une émotion moins intense, parfois. Ainsi le portrait de « Petite fleur » ne parvient à duper le regard de cette caméra trop réaliste, allant même à créer une certaine gêne face à une narration manquant de sincérité et de vécu, tant dans la gestuelle que le regard. Mais l’on oublie vite ce passage à vide, pour en revenir à la conviction profonde qu’a le cinéaste, car Jia Zhang-ke prend le risque d’une narration fictive, pour retranscrire et compiler un melting-pot d’histoires, d’anecdotes et de récits.

L’audace de Jia Zhang-ke réside dans son devoir de mémoire. Cette audace qu’il campe, Jia la prolonge à travers ce récit mêlant documentaire et fiction via des faits établis et un imaginaire qu’il a créé au grès de ses rencontres. Jia capte avec sa caméra le temps du changement et les émotions pour ceux qui le vivent comme une page qui se tourne pour en écrire une nouvelle.

24 City c’est l’usine 420 dans le Chengdu de nos jours. Cette usine aéronautique militaire, symbole d’une Histoire chinoise, échos du passé devant disparaître pour laisser place à un complexe d’appartements de luxe (baptisé justement 24 City), est le personnage principal de l’œuvre, narré tour à tour par huit personnages de générations différentes, huit expériences individuelles faisant l’échos d’une période.

La mise en scène de Jia Zhang-ke dans 24 City est incroyablement complexe même si l’œuvre semble d’une réalisation des plus simpliste. Jia pose sa caméra et filme les derniers vestiges d’une épopée humaine révolue : ateliers, bureaux, couloirs, cours,… les lieux craquelés par le temps et l’Histoire lesquels poussent leurs derniers soufflements captés par le regard du cinéaste. Soixante ans d’histoire, soixante ans d’une tragédie pour ses protagonistes qui portent en eux le travail du temps et les stigmates d’un sacrifice pour la nation.

Le montage, les plans, la musique, les citations qui s’inscrivent sur la pellicule sont merveilleusement employés et participent amplement à la force de 24 City, nous permettant l’immersion de ressentir les émotions distillées tout au long de cette œuvre. C’est en cela que le cinéma de Jia Zhang-ke est important et qu’il démontre avec 24 City, la nécessité de montrer une situation, ses causes et conséquences, ainsi que les bouleversements de tout un peuple. Jia Zhang-ke se fait garant de garder traces de l’éphémère de l’Homme.
I.D.

mercredi 25 mars 2009

Les seigneurs de la guerre (Tou Ming Zhuang) de Peter Chan

mercredi 25 mars 2009
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Le réalisateur Peter Chan signe avec Les seigneurs de la guerre (2007) un film historique retraçant l’histoire de la révolte des Taiping. Entre 1851 et 1864, cette guerre civile est connue pour être le conflit le plus meurtrier de l'Histoire de la Chine, avec un bilan de 70 millions de victimes.

Peter Chan a choisi de suivre le destin de trois hommes : un militaire (Jet Li), un homme d'honneur (Takeshi Kaneshiro) et un idéaliste (Andy Lau). Trois hommes que le hasard réunit, se jurent fidélité et allégeance. Désormais, ils sont frères de sang, à la tête d'une armée de bandits qui deviendront leurs soldats. Ensemble, ces seigneurs de la guerre combattent pour obtenir le pouvoir. Une fois la victoire accomplie, le plus dur les attend : honorer le serment qui les unit.

Se déroulant dans la Chine des années 1870 où l’on se bat à coups de lances, sabres et arcs, le réalisateur donne à voir des affrontements sanglants, des corps-à-corps en masse et des champs de batailles recouverts de corps inertes. L’un des aspects les plus frappants du film est la guerre de tranchée, déjà utilisée à l’époque avec les mêmes hécatombes. Au-delà de l’aspect guerrier du film, le scénario développe une histoire d’amour tragique et impossible, ainsi que la mise à l’épreuve d’une amitié entre les trois personnages principaux scellée par un pacte. Bref, une reconstitution historique avec un nombre impressionnant de figurants, des prises de vues aériennes des combats, d'images somptueuses, bien que ce film ne soit pas à mettre dans la lignée esthétique de film comme Hero.

Le tout est très bien mené avec le retour d'un Jet Li en général déchu bien que celui-ci, il est vrai, ait pris quelques kilos, et bien loin de ces dernières prestations hollywoodiennes très décevantes. Un Takeshi Kaneshiro convaincant en homme d’honneur et un Andy Lau, qui nous emporte dans un rôle d’idéaliste qui lui sied à merveille. Bref ce trio, d’une remarquable intensité nous emmène sans difficulté à travers la Chine du XIXème siècle.

Les seigneurs de la guerre s’impose donc en tant que film de guerre avec des scènes de batailles dantesques et des personnages tiraillés par l’honneur, la trahison, la violence et l’amour.

Oswald Magot

samedi 21 mars 2009

The Chaser de Na Hong-Jin : Proxénète Vs Serial killer

samedi 21 mars 2009
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The Chaser (2008) premier long métrage du cinéaste coréen Na Hong-Jin annoncé comme « la bombe du cinéma coréen » et la surprise cinématographie du genre, se révèle décevant car peu innovant, et de moins bonne prestance que certains de ces prédécesseurs tels « Memories of murder » de Bong Jong-ho, tant sur la réalisation, que sur la trame.

Tiré d’un fait divers, le film suit la traque d’un homme Joong-Ho, ancien flic reconverti en proxénète, suite à la disparition de quelques une de ses « filles ». Ce dernier soupçonne un individu de prétexter les services de ces prostituées dans le seul but de les revendre. La traque commence. Son enquête va le mener à la rencontre d’un serial killer, Young-min qu’il va parvenir à "coincer", au dépend d’une police coréenne incompétente, qui n’aura de cesse de douter des procédures à suivre, et aux manigances plus que douteuses. Dans cette ambiance nocturne et vaseuse, les interrogatoires vont bon train, tandis que Joong-Ho tente en vain de retrouver Mi-jin, la dernière prostituée kidnappée par le serial killer, qu’il a forcé à aller travailler alors que cette dernière était souffrante.

L’ancien flic proxénète devient l’anti-héro par excellence, un anti-héro mainte et mainte fois vu, vulgaire, violent et bourrin, au passif houleux et dont l’humanité reste à prouver. Car la force qui le pousse à retrouver Mi-jin, ne vient d’une quelconque affection mais d’une profonde culpabilité, intensifiée par la découverte d’une enfant cachée.

Le film souffre de stéréotypes trop souvent vus, malgré une ambiance générale correcte. The Chaser ne détonne pas, ne surprend pas, ni dans sa réalisation, ni dans le scénario tiré d’un fait divers, qui n’est pas assez approfondi, pour finir de manière conventionnelle entre le décès d’une captive, une confrontation finale trop raisonnée et la naissance d’une évidente relation entre une orpheline et un ancien flic proxénète. Plus le film avance et plus on s’enlise dans des automatismes connus, qui ne parviennent à donner le piquant et la singularité retrouvée « une » certaine surprise signée Bong Jong-ho.

Sans être une « bombe cinématographique » Na Hong-Jin signe tout de même un polar divertissant et rythmé malgré un film globalement long pour une traque teintée de quelques passages futiles.

mardi 17 mars 2009

L'île nue de Kaneto Shindo : L'obsession de la terre

mardi 17 mars 2009
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L’Île nue de Kaneto Shindo (1960) est une œuvre cinématographique surprenante emprunt d’une très belle esthétique et quasi-muette. A travers des plans séquences longs et répétitifs, le réalisateur donne du sens à son œuvre et rythme le quotidien d’une famille japonaise par un subtil thème musical, témoignant tantôt de la rudesse du travail de la terre, du bonheur ou du chagrin. Les plans se succèdent et se ressemblent comme un éternel refrain. La famille travaille dure, entre les incessants coups de rame les menant à l’île voisine (superbes plans en contre plongée de Toyo, la mère et Senta, le père dans la barque) pour chercher l’eau qui irriguera leur terre et les incessants gestes portant cette même eau à la terre ; cette irrigation raisonnant comme une perpétuelle obsession.

Si l’Île nue peut paraître comme une œuvre simpliste car très épurée tant sur la dynamique de l’image que du son, elle se dévoile au fond comme une œuvre très poétique car suscitant sans cesse l’imagination et l’interprétation de son public. Le jeu intime des acteurs, les plans succins, la mise en scène volontairement rythmée par moment où la caméra suit une famille courant après le temps (repas pris à la hâte, allée et venue sans fin d'île en île), et la musique suscitent souvent l’interrogation quant au véritable message porté par l’auteur. Au final, les scènes se chevauchent entre les visions heureuses et malheureuses d’une vie de paysan, ponctué de partage familiale et de drame, tel la perte d’un enfant. Et l’on assiste béatement à un retour à la réalité dont Toyo (la mère) mettra un point d’honneur par une scène bouleversante où elle est prise d’une crise de désespoir. Malgré tout, la vie doit reprendre son cours et le travail de labeur aussi.

Kaneto Shindo signe une œuvre magistrale sur les conditions difficiles des paysans japonais, mêlant ambiance pesante et grave, par la répétition des plans, une superbe image, et une musique charismatique, signée Kikaru Hayashi, donnant tout le relief à un film quasi-muet, sincère et émouvant.

lundi 16 mars 2009

Résultats du 11ème festival du film asiatique de Deauville 2009

lundi 16 mars 2009
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Je vous ai parlé mercredi 11 mars du Festival du film asiatique de Deauville, l'évènement s'est achevé hier, les résultats sont tombés, voici le palmarès :

Lotus d'Or : Breathless (DDONG-PA-RI) de Ik-june YANG, Corée du sud

Prix Air France : Breathless (DDONG-PA-RI) de Ik-june YANG, Corée du sud

Prix du Jury (ex-aequo) :
All Around Us (GURURI NO KOTO) de Ryosuke HASHIGUCHI, Japon
The Shaft (DIXIA DE TIANKONG) de Chi ZHANG, Chine

Lotus Action Asia : The Chaser de Na Hong-jin, Corée du sud

mercredi 11 mars 2009

11ème festival du film asiatique de Deauville - 2009

mercredi 11 mars 2009
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Aujourd'hui, mercredi 11 mars marque le début du 11ème festival du film asiatique de Deauville. L'évènement se déroulera jusqu'au dimanche 15 mars 2009 prochain. Le programme est plus qu'alléchant, laissant entrevoir une sélection très hétéroclite : Japon, Chine, Hong kong, Taïwan, Inde, Corée du sud, Kirghizstan et Afghanistan.

A noter l'hommage rendu à LEE Chang Dong [GREEN FISH (1997), PEPPERMINT CANDY (1999), OASIS (2002), SECRET SUNSHINE (2009)] et le regard posé sur LEE Yoon-ki [THIS CHARMING GIRL (2004), LOVE TALK (2005), AD LIB NIGHT (2006), MY DEAR ENEMY (2009)]

Sont en compétition cette année, les 11 films suivants :

- ALL AROUND US (GURURI NO KOTO) De: Ryosuke HASHIGUCHI
Japon | 2008. 35mm. couleurs.1,85. dolby srd. 140 minutes.

- BREATHLESS (DDONG-PA-RI) De: Ik-june YANG
Corée du sud | 2008. 35mm. couleurs.1,85. dolby srd. 130 minutes.

- CHANT DES MERS DU SUD (PESNI JUZHNYKH MOREJ) De: Marat SARULU
Kirghizstan | 2008. 35mm. couleurs. 1,85. dolby srd. 84 minutes.

- CLAUSTROPHOBIA De: Ivy HO
Hong kong | 2008. 35mm. couleurs. 1,85. dolby srd. 100 minutes.

- FIRAAQ De: Nandita DAS
Inde | 2008. 35mm. couleurs. 1,85 dolby sr. 101 minutes.

ISLAND ETUDE (LIAN XI QU) De: En CHEN
Taïwan | 2008. 35mm. couleurs. 1,85. dolby srd. 108 minutes.

- L'ENFANT DE KABOUL (KABULI KID) De: Barmak AKRAM
France & afghanistan | 2008. 35mm. couleurs. 1,85. dolby sr. 94 minutes.

- MEMBERS OF THE FUNERAL (JANG-RYE-SIK-UI MEMBER) De: Seung-bin BAEK
Corée du sud | 2008. hd cam. couleurs.1,85. dolby srd. 99 minutes.

- NAKED OF DEFENSES (MUBOBI) De: Masahide ICHII
Japon | 2008. hdcam. couleurs.1,85. dolby sr. 88 minutes.

- THE SHAFT (DIXIA DE TIANKONG) De: Chi ZHANG
Chine | 2008. 35mm. couleurs. 1,85. mono. 98 minutes.

- TRIVIAL MATTERS (POR SEE YEE) De: PANG HO-CHEUNG
Hong kong | 2008. 35mm. couleurs. scope. dolby srd. 92 minutes.

mercredi 4 mars 2009

Bangkok Dangerous : Dangereux

mercredi 4 mars 2009
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Les frères Oxide et Danny Pang font de la capitale thaïlandaise une ville froide et glauque. Dans Bangkok Dangerous (1999) nous sommes loin d’une ville carte postale. Les rues y sont étroites, sales et sombres. Les demeures sont vétustes. Les esprits sont échauffés, baignés dans la musique techno des boîtes de nuit à strip-tease et des stroboscopes.

Kong, un tueur à gages est notre guide dans cette ville dangereuse ou plutôt dans les bas quartiers. C’est un sourd-muet qui souffre d’une incapacité à communiquer et il n’a en tout est pour tout que deux amis. Aom, la femme qui lui donne les contrats qu’il exécute froidement, sans remords et Jo qu’il considère comme un frère, celui qui l’a initié au métier de tueur. Sa vie se voit bouleversé lorsqu’il rencontre Fon, une jeune pharmacienne dont il tombe amoureux. Cette dernière pourrait devenir l’occasion d’expier ses fautes.

Les frères Pang ont voulu faire de Bangkok Dangerous un film noir et d’une extrême violence, sans grand espoir de voir des jours meilleurs pour les personnages qui parsèment le film. Le film est par moment dramatique, romance désespéré et délinquance de survie. Le personnage principal, Kong exécute ses contrats comme une vengeance sur la vie. Il ne sourcille pas une fois. Il a vécu dans un monde violent et pour lui mettre fin à des vies fait partie d’une normalité. Il empoche puis tue et ainsi de suite. La banalité du contrat.

Dans le film des frères Pang, l’infime espoir vient d’une jeune femme, Fon. Kong en tombe amoureux et se permet pour la première fois de voir les choses de façon différente. Il rêve d’une autre vie, gagne un espoir absent auparavant. Kong et Fon parviennent malgré la barrière de la surdité à communiquer l’un et l’autre. Pourtant la réalité d’une vie violente n’est jamais bien loin et ça les frères Pang parviennent à la retranscrire via un film réaliste sur les conditions de vie de nos protagonistes.

Bangkok Dangerous est un film à voir mais ne deviendra pas une référence. Les frères Pang utilisent une réalisation très saccadée, clippesque qui marche par moment avec de belles idées mais qui peuvent rendre allergique dans d’autre. Le dosage des effets visuels dans leur mise en scène n’a pas toujours été maîtrisé correctement ce qui donne parfois des scènes inutiles. Oxide et Danny Pang arrivent tout de même à leurs fins, celle de nous montrer une partie de la ville de Bangkok, celle où la survie par le crime est omniprésente.

I.D.

dimanche 1 mars 2009

Far North de Asif Kapadia - Sortie le 18 mars 2009

dimanche 1 mars 2009
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J'ai reçu en fin de semaine dernière une gentille invitation de Marie pour la projection presse du film Farth North de Asif Kapadia, un jeune réalisateur anglais. Ne pouvant pas assister à ce RDV, je tenais tout de même à vous informer de la sortie de ce film indépendant, le 18 mars prochain, avec en rôle principal Michelle Yeoh.

Pour plus d'informations :
- Far North sur Allociné
- Far North, la page Facebook

Synopsis
:
Le film est un conte épique pour adultes, un récit hors du temps. L’histoire de deux femmes qui vivent isolées de toute civilisation et dont l’apparente sérénité va être bouleversée par l’arrivée d’un homme blessé qu’elles vont recueillir. C’est une immersion saisissante dans l’univers immaculé des paysages du Svalbard (archipel au large de la Norvège, 80° de Latitude Nord) : un itinéraire fascinant dans un Grand nord mythologique.

 
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