Deuxième volet des aventures de
Sasori, Elle s’appelait Scorpion/Joshuu
Sasori: Dai-41 zakkyo-bô (1972) voit à nouveau l’actrice Meiko Kaji endosser le rôle de
Matsushima « Sasori » Nami. Toujours dirigé par Shunya Ito, l’œuvre
s’inscrit dans une suite logique où l’on retrouve Sasori un an après sa
première aventure. Emprisonnée, affaiblie et humiliée, Matsu n’en garde pas
moins une même détermination.
On la retrouve donc en prison où
l’infâme directeur borgne, Goda la maltraite et tente de casser son image qui
influence grandement ses co-détenus. Ce dernier n’a pas oublié que son œil
perdu était de sa faute. Pourtant, lors d’une journée de travaux forcés comme
punition, Matsu parvient à s’échapper avec six autres détenus. Goda en fait une
affaire personnelle et met tout les moyens pour arrêter leur cavale.
Dans ce Elle s’appelait Scorpion, Meiko Kaji continue à incarner le spectre
d’un soulèvement contre l’infamie des autorités qu’elles soient de l’univers
carcéral qui fait peu d’état des prisonniers, ou bien d’une société qui fait
peu d’état des femmes. Le charisme de l’actrice joue pour beaucoup. Sasori
garde un profond ressentiment avec ce mutisme encore plus marqué, un même
faciès froid qui n’exprime rien. Exit
le sourire « chair de poule » du premier volet, ici l’actrice se
concentre sur le regard. Un regard impassible, des yeux
« assassins ». Ce regard qui parvient à voir et à nous faire partager
le passé de ses compagnes de cavale. Des femmes qui ont tout comme elle une
dent contre la gent masculine.
Elle s’appelait Scorpion répond aux attentes d’une suite, sachant
que le premier volet frappait fort. La violence de l’œuvre est ici plus sombre.
La part sombre de l’être humain qui s’exécute par une barbarie de la vengeance
ou de façon gratuite. Si l’œuvre est moins emprunte d’érotisme, les limites
sont parfois dépassées avec une rage peu commune. Une rage dont les hommes en
sont la cible. Des
hommes à la fois juge et bourreau qui annihilent tout espoir de liberté comme
d’émancipation.
Instant interprétation : Il faut voir ces prisonnières
habillées de poncho (couverture) qui ressemblent étrangement à des toges. Voir aussi
Matsu crucifiée et violée dans un environnement hostile, une carrière de pierre
qui fait échos à un désert. Nous ne sommes alors pas loin d’une œuvre
(blasphématoire ?) qui rejouent les récits bibliques d’un peuple (les
hébreux/les prisonnières) cherchant la Terre promise/la liberté avec toutes les
humiliations perpétrés par les égyptiens/les surveillants de prison. Matsu
serait-elle un Moïse au féminin, une espèce de Messie, reine des prisonnières
et des femmes-esclaves ? Une chose est sûre, elle n’en reste pas moins le symbole
d’une révolte, celle des femmes.
D’un film de prison de femmes, Elle s’appelait Scorpion de Shunya Ito
s’inscrit dans la pure tradition des films de cavale. Sept femmes qui courent à
la recherche d’un passé respectif. Un passé qui leur échappe à mesure que leur
avancée s’opère dans des paysages de désolation (village abandonné, flan de
montagne nu, décharge…) jusqu’au dénouement finale. Matsu, seule survivante de
cette échappée tragique endosse le costume noir de Sasori pour exécuter une
Vengeance collective, celle du groupe d’évadées. Par sa main, Sasori frappera
sept fois, sept coups de couteau pour les sept fugitives dont elle faisait
partie. L’œuvre se termine sur une victoire, l’allégorie de la liberté pour les
femmes (ici les prisonnières). Ces dernières courent sans s’arrêter, heureuses.
Matsu continuera à courir et à travers elle, toutes celles enfermées dans leur
condition.
Shunya Ito fait à nouveau preuve
d’un énorme talent de réalisateur. Chaque plan semble être un tableau de maître
où premier et arrière plan sont composés de la même façon. Le cadrage, l’utilisation
du cinémascope participe à la théâtralité de certaines scènes. La musique y est
magnifiquement utilisée, une héroïne de plus à cette œuvre dynamique et
franche. Parfois irréelle, l’œuvre est d’une beauté esthétique impressionnante.
I.D.
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