vendredi 27 février 2015

La Saveur de la pastèque : Source

vendredi 27 février 2015



Avec La Saveur de la pastèque / tian bian yi duoyun (2005), Tsai Ming-liang signe une comédie dramatique musicale. Film que l’on pourrait également qualifier d’érotique, il met en scène un acteur pornographique qui rencontre une jeune femme alors que Taïwan subit une sécheresse persistante. Au milieu de la course à l’eau et du jus de pastèque comme alternative, une liaison voit le jour entre le jeune homme et cette surveillante de musée, voleuse d’eau…

La Saveur de la Pastèque c’est le film quelque peu maso d’un auteur qui aime tant l’eau. L’eau qui était si présente dans ses œuvres antérieures est ici rare. Tsai Ming-liang s’en prive. La sécheresse s’impose, la pénurie se ressent mettant en alerte les personnages de son film. Sécheresse comme écho du style « TML » ? Sans doute, peut-être bien, quoique non. L’auteur taïwanais parvient à renouveler son univers tout en s’intéressant à dépeindre ces corps et leurs sexualités. Comme depuis ses débuts, il dépeint des relations humaines qui se veulent difficiles, à l’image de la solitude et de l’incommunicabilité. Pour se faire, il met la pastèque dans tous ses états au centre des d(‘)ébats, métaphores multiples au ton décalé et souvent crues. De cet ensemble à la fois morose et à la fête, il s’en dégage une forme d’originalité qui le caractérise comme ce cinéma d’auteur fait de plan fixe et de silence. Comme il l’avait déjà fait dans The Hole (1997), Tsai Ming-liang fait également appel à des scènes musicales avec ses chants et ses chorégraphies. Ces intermèdes le plus souvent colorés tranchent avec ce quotidien sans eau où l’on festoie par le biais de la pastèque.


Quasi mutique, La Saveur de la Pastèque, septième long-métrage de son auteur suinte un érotisme décomplexé. Il s’en dégage une moiteur sensuelle omniprésente, et l’on retrouve avec plaisir les personnages de l’univers « TML ». Comme une suite de Et là-bas, quelle heure est-il ? (2001), ce sont Hsiao-kang et Shiang-chyi qui se retrouvent. Autre fois à distance, une relation de proximité s’instaure entre eux. Une grande partie de l’action se déroule alors en intérieur et rappelle fortement le huis-clos de The Hole (1997). Visuellement le film est réussi. Elle va de la composition des cadres (utilisation du grand angle) retranscrivant un environnement sans vie à une photographie souvent angoissante lorsqu’elle n’explose pas dans les parties musicales (faisant la part belle aux chansons populaires). On soulignera par ailleurs les interprétations de Lee Kang-sheng et Chen Shiang-chyi. Ils campent à merveille leur personnage respectif, entre situations désillusionnées et franchement humoristiques, à tendance burlesque et absurde. Et que dire de cette séquence finale tirée en longueur ? Surprenante, inattendue, elle en laissera plus d’un coi.


La Saveur de la Pastèque est un savoureux melting-pot des genres. Un film qui sait être prenant et drôle, étrange et original. 
I.D.

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