mercredi 5 mai 2010

Dolls : Variation autour de l'amour [Rétro Takeshi Kitano, l'iconoclaste]

mercredi 5 mai 2010

Avec Dolls (2002), Takeshi Kitano se remet à l’amour en déclinant trois histoires, celle d’un jeune couple Matsumoto et Sawako, celle d’un ancien yakuza, Hiro, rongé par le regret, et celle d’un fan obsédé par une chanteuse à succès, Nukui.

Ouverture sur le Bunraku, un théâtre japonais de marionnettes mettant en scène des histoires d'amour. Une longue et précise séquence d’introduction, pas des plus transcendante mais nécessaire, où Kitano livre un tableau où tragédie se mêle à l’amour. Le ton est mis. Dolls représente l’amour à travers une déclinaison, trois personnages. Kitano ne livre pas une simple fresque romanesque, et connaissant l’artiste il a lieu de penser que Dolls sera l’incarnation d’une œuvre ambivalente, magnifiant l’amour avec une tragédie extrême. Car il est histoire d’amour tant et aussi de sacrifice. 3 âmes, 6 êtres qui en place d’un bonheur proche, vont devoir se livrer à des choix cornéliens. Alors le couple Matsumoto abandonnera une vie de citoyen paisible pour une existence marginale, Hiro, le vieux yakuza tentera de retrouver une affection perdue, et Nukui se perdra dans une obsession qui le poussera à l’extrême.


Kitano s’attache à une relation en particulier, celle de Matsumoto et Sawako, qui sera le fil conducteur de son film. Et pourtant s’il est une réussite, elle résiderait dans une histoire, celle de ce vieux Yakuza. Hiro, repensant au sacrifice d’une vie qui l’a privée du sentiment d’amour. Hiro tentant de renouer avec un passé dans un lieu qu’il fréquentait d’antan. Les instants sont choisis avec goût et sont de toute beauté frôlant entre simplicité, originalité et pudeur. Vraiment, les moments sont irrésistibles et la retenue découlant des dialogues de ces anciens amants fabuleuses.

Visuellement Dolls est une parfaite réussite, oscillant de saison en saison (la nature étant ici une composante essentielle), partageant couleurs chatoyantes de l’automne et ces dominantes chaudes à la froideur de l’hiver. On savait Kitano doué pour les arts plastiques, il fait de Dolls une peinture à part entière. C’est avec admiration que l’on se plait à penser que le cinéaste a sorti le grand jeu, délivrant toute le talent qui l’habite.

S’il est un point noir dans le long métrage de Kitano il serait sans conteste une fin tirant en longueur, essoufflant littéralement l’intérêt du film. Grand regret. Certains diront que l’esthétisme est poussé à outrance et laisse paraître un côté trop lisse. Je dirais que cette minutie fait partie de la robe qui habille si joliment cette œuvre.

Bercé par un vague à l’âme et une certaine fatalité, Dolls sort des sentiers souvent empruntés pour dépeindre l’amour de façon unique. Kitano avait caressé de bien délicate manière ce sentiment avec A Scene at the Sea, il renouvelle avec autant de tact cette entreprise.

> Rediffusion vendredi 18 juin 20h30, Cinéma 1, Séance présenté par Michel Simon
Diana

6 commentaires:

Unknown a dit…

Je ne me rappelle plus très bien de la fin du film. C'est celle où l'on suit les deux amoureux dans la neige, jusqu'au final...suspendu? Poignant, un très grand mélodrame moderne. Si j'ai l'occasion de le revoir à Pompidou, je ne vais pas me gêner.

Diana a dit…

Tu as gardé de bon souvenir, c'est bien ce périple que l'on suit. C'était beau et esthétique, ces silhouettes marchant dans la neige sans fin, toujours ces mêmes pas, cette même attitude, mais c'était d'une longueur extrême... vraiment trop long. A part ça Dolls demeure un long métrage réussi et abouti.

Unknown a dit…

Dommage que tu n'ais pas eu la force de tenir, car de mon côté je trouve l'épisode final très beau. Long, difficile, un peu perdu, un peu comme ce couple en fait. Et la musique de Joe Hisaishi, des nappes de synthé incroyables. On a pratiquement jamais entendu pareil travail chez Kitano, Miyazaki, ou durant ses premières collaborations avec Nobuhiko Obayashi! Dommage que leur "sépération" soit pour des raisons financières..!

Donc pour le moment, ça va, tu ne t'ennuies pas trop devant les oeuvres du maître? ^^

David Tredler a dit…

Dolls m'avait énormément déçu à l'époque... Peut-être faudrait-il que je le revois, mais l'esthétique au profit du narratif ne m'avait pas semblé être le fort de Kitano.

Unknown a dit…

Avec trois histoires bien distinctes, dire que Kitano privilégie l'esthétique à la narration est une belle hérésie =)

La narration peut paraître faiblarde par sa lenteur et sa mélancolie (encore que, j'aimerais bien savoir pourquoi et à quel niveau) mais voilà l'un des films de Kitano les plus mélancoliques et douloureux. Et la narration est justement intéressante dans la mesure où il fait son propre film "à la Chikamatsu" dans un contexte pourtant bien contemporain et moderne. Chose qu'on ne verra jamais dans ses films de yakuza.

David Tredler a dit…

Comme je l'ai écris Xavier, je n'ai pas revu Dolls depuis sa sortie ciné, et je m'en souviens peu, donc ce n'est que du sensoriel que je parle.
Moi je me souviens d'un film privilégiant le ressenti à une intrigue forte. Certes il y avait plusieurs histoires disctinctes, mais les histoires ne font pas tout le temps des films à la narration absorbante. Un film peut vouloir dire plein de choses et ennuyer, d'autres sembler ne rien dire et fasciner.
Moi Dolls, malgré ses histoires croisées, m'avaient semblé être un film qui parlait un poil dans le vide, tout de même. Mais le provocation me fait toujours surenchir ma déception, et encore une fois, voilà 7 ans que j'ai vu Dolls, de 21 à 28 ans, parfois les goûts changent ;-)

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