Takashi Miike, le nihilisme sans borne. Voilà l’une des manières qu’on pourrait qualifier le cinéaste japonais. Avec IZO / Izô : Kaosu Mataha Fujôri no Kijin (2004), Takashi Miike reste fidèle à lui-même, un cerveau malade engendrant une œuvre des plus complexe qui en refroidira plus d’un. L’œuvre se veut dérangeante, folle et exacerbée. Une ouverture épileptique qui nous montre la fécondation, la naissance et la mort d’un homme dans le Japon du 19ème siècle dans un maelstrom d’images d’actualités historiques. Un homme crucifié refusant de mourir et qui reviendra dans le Japon actuel se venger de l’élite, une vengeance pleine de rage et de haine…
IZO se défait de toute contrainte (contrainte de narration, contrainte temporel, etc…). Le film devient une entité de l’absurde qui laisse transparaître la générosité d’un auteur. Une générosité dans l’excès et l’exubérance. A travers IZO, Takashi Miike combat le mal par la mal. Il y dénonce les dérives de nos sociétés et la noirceur qui y habite, ainsi que la déviance de l’être humain. Il tire à boulet rouge sur les institutions à l’image de la justice, de l’armée ou bien encore de la religion. Takashi Miike met en scène une œuvre profondément révolutionnaire qui s’attaque à toute forme de pouvoir de l’homme faussement investit par ce même homme. Il fustige ainsi la démocratie et le principe de nation. IZO se veut un pamphlet dur sans aucune retenue.
A travers son personnage fort captivant pour tout ce qu’il représente, IZO (à la fois homme et démon, avec et sans âme) est l’incarnation de la destruction jusqu’au boutisme. Il est guidé par des pulsions sexuelles et meurtrières s’incarnant dès lors comme les maux de notre société, il les porte en fardeau et les expulsent dans une violence viscérale et extrême. Il est une réincarnation vengeresse devenant un démon à mesure qu’il avance dans l’infini. Une imperfection destructrice néfaste d’un monde qui trouve malgré tout une nécessite en lui. Une nécessité purificatrice qui le voit condamner à errer, tuer sans fin puisqu’il ne peut mourir. Un démon du chaos comme miroir d’un monde fou.
IZO est ce que l’on pourrait qualifier d’œuvre humaniste provocante dans cette façon de dépeindre la violence d’un monde par la violence d’un individu. La réalisation est acerbe avec un casting impressionnant de personnalité du cinéma de Yuya Uchida à Takeshi Kitano en passant par Kaori Momoi ou bien encore Ken Ogata. On notera également la présence du chanteur d’acid-folk Kazuki Tomokawa dont les paroles chantées se marient admirablement à cette œuvre de cinéma décapante. Un style de musique parfait qui s’invite dans des interstices ayant ici leur importance. IZO est un monstrueux n’importe quoi cinématographique qui mérite qu’on s’y attarde en dépassant les appréhensions. Une œuvre qui plus elle avance livre la décadence à l’état brut somme toute singulière.
> Rediffusion 24 juin, 20h30, Cinéma 2
I.D.
15 commentaires:
Oh, sérieux ? Dis-moi que ce ptit paluchage intellectualisant d'une daube ridicule est ironique, I.D. !! Tu penses tant de bien de cette oeuvre malade et pitoyable ? Naaaaaa, je peux pas le croire !!! ;-)
Pas mieux, Tred'...
Sans concertation aucune, j'ai aussi trouvé en Izo une démarche intéressante. La forme peut rebuter j'en conçois mais il réside dans Izo une profondeur sur la cruauté et la violence. Le film gagne en intérêt à mesure qu'il avance. Miike construit son récit en distillant des indices sur la noirceur qui anime Izo. Sa violence à l'état brut prend un sens, appuyée par ces images d'archives et les interprétations d’acid-folk de Kazuki Tomokawa d'une grande intensité.
Attendez les enfants c'est une blague là ! lol
Je peux pas croire que deux personnes comme vous trouviez de telles qualités dans Izo, c'est pas possible. Je veux bien ne pas être d'accord sur 1 million de films, mais là, Izo, c'est pas possible... Il n'y a aucune finesse, aucune profondeur, aucune intensité. Ni dans la forme ni dans le fond. C'est le vide intersidéral. Ce n'est pas en mettant un personnage de militaire et un personnage de prêtre et en les faisant zigouiller qu'on a un quelconque discours politique qui annihile la laideur, la redondance et le ridicule. Ca serait trop facile.
Merci Xavier, toi au moins tu me rassures ^^ (c'est rare non ? ;-))
Pas mieux, Diana...
ps : jamais d'ironie de ma part, jamais. Mes amis, je vous regarde à cet instant avec un regard à la Pei Mei cad plein de mépris. ;)
Je ne comprends pas ID, quand en sortant du film tu disais en te marrant "J'ai hâte d'être à demain pour écrire dessus", j'étais persuadé que c'était pour le démolir en bonne et due forme, pas pour l'encenser et lui trouver un tel discours...^^
IZO est plein de qualité, non franchement. Sans exagérer, rien de cela ici. On n'est pas loin de l'oeuvre expérimentale. Et je ne suis pas consommateurs de drogue ! Donc mes propos ne sont pas altérés.
Le film, j'ai bien accroché même si j'avoue que visuellement c'était pas toujours terrible terrible. Mais j'ai su en faire abstraction et y voir des choses très intéressantes.
D'ailleurs avec Diana, on s'étonnait de ton point de vue à chaud. Et puis finalement pas. C'est toi. Rien que toi. Donc, on sait. Comme je me doutais de la réaction des deux demoiselles qui t'accompagnaient. Marrant tout de même toutes ces personnes qui sont partis en court de route... ça me fait rire.
Sinon. Et oui, j'avais hâte d'y être au lendemain parce que j'avais peur de louper des choses pour en dire le bien que j'en pensais. Et c'est ce qui s'est passé. Je suis assez déçu du résultat de l'article parce que j'avais des mots, des phrases que je voulais sortir. Pas moyen. Le taf que j'avais m'empêchait d'être dans le truc donc j'ai livré ça. Qui sait ? Peut-être qu'un jour j'y reviendrais dessus et lui donnerais l'article qu'il mérite.
Par contre ce qui me fait flipper c'est que toi (David) et Xavier parveniez à vous retrouvez d'accord... ça ! C'est vraiment flippant ! :)
Ah oui ça c'est flippant, après vos débats houleux... Bon on ne va pas s'en plaindre :)
Tu vois finalement c'est grâce à toi qu'on fini par s'entendre sur un film avec Xavier, tu peux être fier ID, toi aussi Diana^^
Quand tu dis "on est pas loin de l'oeuvre expérimentale", ça fait bizarre ça sonne presque comme une qualité en soi, "l'oeuvre expérimentale". Mais si tous les films expérimentaux était bons, ça se saurait, non ? C'est louable d'expérimenter, mais ça n'a pas de qualité cinématographique propre, l'expérimentation, tu peux expérimenter dans le mauvais, comme... je sais pas moi... Miike par exemple ;-)
Mais je me souviens pas qu'à chaud vous m'ayez fait part d'un avis contraire au mien... on a peut-être pas tant parlé du film que ça à la sortie... Moi en toute franchise, Izo à la rétro Kitano, ça restera longtemps comme un des 15 ou 20 pires films vus en salle à mes yeux. Sans déconner. C'est SI mauvais que ça à mes yeux.
Je les comprends ceux qui se sont barrés, franchement je leur en veux pas. Moi je ne sors jamais même devant les sombres bouses chiantes, mais sinon j'aurais pu, devant Izo^^
Allons, il n'y a jamais eu de débat houleux (je suppose que c'est celui à propos de papi Koreeda? ^^) entre Tred et moi. Merci d'avoir pris la parole sur le forum, au passage.
Sinon, pour avoir vu une bonne quarantaine de films réalisés par Miike, I.D, je peux t'assurer qu'Izo n'a rien d'expérimental. Vraiment. Ca, c'est fait. Non, en fait, ça, c'est pas fait. Car aussi, le fait de voir partir des gens pendant la séance d'Izo est tout à fait normal : Kitano n'a aucune scène intéressante et les gens ne viennent pas voir Miike, qu'ils ne connaissent pas. Faut pas rêver. Et l'autre raison pour laquelle ils se barrent, c'est qu'un chambara filmé à la MTV avec un sens proprement NUL du rythme (mais ça, chez Miike et son monteur, c'est une habitude), ça exaspère très vite. Pour eux, un chambara, ça doit être filmé comme chez Kurosawa, avec un sens du cadre westernien, de la durée (ou du Berthillon), et une absence d'artifices formels qui dégobillent à l'écran. Je les comprends LARGEMENT.
Moi-même, j'ai du m'y prendre à deux fois avant de voir le film en entier. Au cinéma de Pompidou, si le film avait été projeté dans la salle sous-terraine, je ne sais pas comment j'aurais réagis...
"Papi Koreeda", oh l'autre ! Tout ça parce qu'il a fait Still Walking ^^. Ca m'avait bien fait rire ce petit partage sur le forum. Tred y est plutôt rare ;).
Je ne sais si j'en ai vu une quarantaine des Miike, j'en ai vu pas mal. Entre du Rainy Dog, Full Metal Yakuza en passant par Les Affranchis de Shinjuku, Fudoh ou bien encore les MDP Psycho et autre Graveyard of Honor et j'en passe. Je me dis qu'avec les "grands maîtres" japonais c'est l'un des cinéastes tout aussi japonais dont j'ai vu le plus de film. Mais moi, je perçois IZO comme un film qui pourrait se rapprocher de l'expérimental. Si, si. Après, je me trompe peut-être. Et comparativement à d'autre, il n'aurait rien avoir avec cette étiquette que je lui mets arbitrairement. Mais c'est comme ça. Sur ce...
Ah oui, pour les sièges qui claquent. Kitano ou pas ça me fait toujours rire. C'est avec ces gens-là que j'ai envie d'échanger par moment. Comprendre. C'était le cas pour les films malais ou singapouriens du dernier cycle du Centre Pompidou. Pareil pour Kinatay de Dante Mendoza et d'autre encore. Ca m'intrigue parce que je n'ai pas cette mentalité de me dire, j'aime pas, je m'en vais. Font-ils vraiment l'effort de donner la change aux films ? Je trouve cela dommage. Il n'empêche que ces touristes des salles obscures m'énervent parfois. J'aimerais qu'ils m'attendent à la sortie et qu'on discute de cette désaffection.
Si tu ne l'a pas encore vu, l'expérience GONIN était atroce à ce niveau : c'est juste le meilleur film de Takashi Ishii, le rôle le plus terrifiant de Kitano au cinéma, copie 35mm, salle à l'étage, et des sièges qui claquent. J'étais avec un ami, on en revenait pas. Mais que leur faut-il, bordel?!
Ne me dis pas que tu étais avec le geekissime Momotaro !! Qui par ailleurs apprécie les qualités d'IZO ;).
Gonin, on l'a loupé à sa 1ère diffusion et je l'avais mauvaise. Mais la prochaine fois qu'il est projetté au Centre. On y sera avec Diana. On ne peut pas le louper celui-là et depuis le temps que j'attends de le voir. Jamais eu le courage de me le procurer. Donc bonne occasion qui se présente là. Un bail qu'on ne s'est pas croisé au détour d'une salle toi et moi (nous)...
Ca risque de me faire mal aux fesses, mais je retenterai bien l'expérience jeudi 3 juin, à 20h30. Oui, j'ai eu le plaisir de le voir avec Mohamed, spécialiste de Takashi Ishii. Ca faisait pas mal de temps que je ne l'avais pas vu. Discussions passionnées jusqu'à Gare de Lyon, en sortant de la projection de Gonin! Voilà le genre de gars que j'aimerais bien voir débarquer sur cinemasie.
Je serai au Centre dimanche, dès 14h30. Au plaisir de vous voir ou de faire la séance de Gonin ensemble, qui devrait sortir, selon l'un des énièmes blogs de Wildgrounds, chez HK VIDEO (http://asiafilm.fr/2010/05/11/sortie-dete-shinjuku-incident-gonin/) !
Ouais, Mohamed, chic type, un sacré connaisseur. En effet, c'est un bonhomme comme lui que vous devriez avoir au casting de Cinémasie, c'est clair. Faut l'embaucher. ^^
Pour dimanche. Là, je pourrais plus dire mais il me semble qu'on sera également dans le coin. Par contre, j'ai un trou de mémoire en ce qui concerne l'heure et le film en question. Rien sous la main pour recouvrer la mémoire.
> selon l'un des énièmes blogs de Wildgrounds
Tiens, on en causait avec Diana. Intrigué par ce Asia Film. Notamment avec un billet qui lui était consacré sur Wildgrounds que je visite. Donc c'est la même famille d'après ce que tu écris.
"énième" ? Ils en ont beaucoup de blog les lascars ? Mais ils sont combien ? J'avoue que j'étais bluffé de certaines infos balancées sur ce dernier blog qui est récent mais vachement réactif. Bien.
Tiens, j'ai même découvert un jour lointain qu'il existait un blog cinémasie... marrant.
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