The Big Durian (2003) (projeté dans le cadre du Cycle Singapour, Malaisie et présenté par le cinéaste, vidéo à venir) est la deuxième réalisation du cinéaste malais Amir Muhammad. Ce film mélange documentaire et fiction pour faire le voile sur un évènement qui a ébranlé la Malaisie. Dans la nuit du 18 octobre 1987, un soldat d’origine malaise armé d’un M16 a un excès de folie, il tue aveuglement dans le quartier de Chow Kit à Kuala Lumpur, un quartier qui s’avère être à majorité chinoise. Cet acte a pour conséquence une panique générale ainsi qu’une réaction hostile des différentes communautés par des manifestations aux relents racistes…
Subversif. Amir Muhammad fait preuve d’une certaine audace en réalisant un tel film. Premièrement, il décide de mettre au goût du jour un chapitre historique qui a fait grand bruit dans la capitale malaise. Á savoir l’acte fou inexpliqué d’un homme qui a eu des suites néfastes pour la population (d’origine) chinoise, ou du moins cet acte fut prétexte pour certain malaisien d’exposer sur le devant de la scène leur animosité envers la communauté chinoise, deuxième groupe politique le plus important du pays. Deuxièmement, en plus de remuer des souvenirs terribles pour nombre de malaisien qui préfère taire ce fait, l’auteur n’hésite pas à égratigner le gouvernement de son pays notamment en fustigeant les personnes qui ont profités de cette attaque en bonne et due forme. Il fustige ainsi des hommes politiques de l’époque ainsi que l’organe principal du parti politique malais au pouvoir qui firent emprisonner certains activistes chinois accusés d’être « communiste ». Encore aujourd’hui ce motif est utilisé pour faire taire certaines oppositions au pouvoir en place.
Devoir de mémoire. Si beaucoup tente d’oublier ou préfère taire ces évènements, Amir Muhammad revient avec insistance sur cette situation de crise en faisant témoigner pas moins de vingt trois malaisiens lambda. Ces derniers s’expriment à tour de rôle pour raconter ce passé mais aussi l’état actuel des choses : la relation entre les différentes communautés en cause. Il leur donne la parole. Malais comme Chinois, Malais d’origine chinoise. De générations différentes, ils donnent leur point de vue, leur ressentit. Certains étaient à peine nés, d’autres étaient adolescents ou ont vécu cette période sous tension au plus prêt. Pour faire digérer un sujet qui se veut tendancieux, Amir Muhammad mélange de vrais témoignages à des propos joués mais qui respectent des témoignages réels. Il crée une réalité alternative pour mieux cerner ces évènements qui ont menés à une telle situation. Le cinéaste malais utilise alors l’arme de humour mais sait être également corrosif sans jamais tomber dans la démagogie ou le populisme.
Informatif. The Big Durian est un film intéressant. Intéressant parce qu’il tente de comprendre et rappeler des évènements symptomatiques d’une Malaisie pluri-ethniques. Intéressant parce que lorsqu’on connait la Malaisie, on sait qu’elle est composée de tout un tas de dualismes. Intéressant parce qu’il permet de mieux comprendre tout ce marasme qui fait de ce pays, un pays si singulier par son histoire, ses communautés, ses religions ainsi que ses us et coutumes. Intéressant parce que même lorsqu’on est étranger à ce pays et à son fonctionnement, Amir Muhammad rend les choses claires et compréhensives. The Big Durian est habilement construit et offre un regard pertinent et critique.
> Rediffusion. Mercredi 3 février 2010, 20h, Cinéma 1
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I.D.
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