vendredi 29 janvier 2010

La Malédiction de l’Homme Huile : Le(s) Cri(s) [Cycle Singapour, Malaisie]

vendredi 29 janvier 2010

La Malédiction de l’Homme Huile / Sumpah Orang Minyak (1958) de P. Ramlee est une production en N&B Malay Film Productions et Shaw Brothers. Le cinéaste malais signe un drame fantastique. Il y tient également le rôle principal.

Á Tualang Tiga, un petit village perdu vit Le Bossu qui est la risée des villageois. Il est constamment insulté et battu. Secrètement amoureux de la fille du chef du village, il profite d’une fête pour lui offrir un présent. Le chef du village décide alors de l’expulser et lui interdit de revenir aux villages. Esseulé, Le Bossu se maudit jusqu’à ce que les membres d’un palais féerique apparaissent. Le chef du palais (messager de Dieu ?) lui propose un vœu. Le Bossu désire devenir beau, c’est chose faite. Mais pour conserver sa nouvelle apparence, il ne devra tuer personne et ne pas être fier. Le Bossu maintenant surnommé Le Beau retourne dans son village natale où trois années se sont écoulées…

La Malédiction de l’Homme Huile est une œuvre kitschissime. Elle est rempli d’artifices qui donnent tout son charme, sans pour autant susciter l’emballement. Le film se laisse regarder, c’est vrai. De là à le vivre complètement, non. La raison est simple, la barrière. Celle qui permet d’assimiler tout le folklore que représente l’Homme Huile dans le panorama cinématographique malais. Si le personnage eut son heure de gloire, un personnage qui s’avère être un violeur en série (rien que ça), est depuis tombé en désuétude. Pourtant, La Malédiction de l’Homme Huile conserve une importance, tant sur les moyens employés à l’époque que sur la morale (ou devrais-je dire les morales) engagée. Ainsi on est en droit de se demander : quel regard alors gardons-nous de ce film de P. Ramlee ?

La Malédiction de l’Homme Huile passe par différent stade. Le drame qui montre la méchanceté d’un groupe qui n’accepte pas la différence. Le fantastique qui permet l’évasion de sa condition. La chance donnée. Le renouveau. L’acceptation du plus grand nombre, un regard cynique sur les masses qui encore une fois n’accepte que la norme. Et puis le drame à nouveau, la fatalité qui frappe et la sanction symbolique. Si Le Bossu est devenu Le Beau, ce dernier enfreint les règles établies par le chef du palais. Il sera alors invisible de tous et perdra les personnes tant chéries. Il perd sa condition d’homme « normal ». Dès lors, le fantastique reprendra le dessus et le diable lui fera une offre qu’il ne refusera pas. Pour ainsi jouir à nouveau d’un physique qui lui permettait d’être accepté de tous.

P. Ramlee engage alors La Malédiction de l’Homme Huile dans un troisième partie dévastatrice. Le Beau devenu l’Homme Huile laisse derrière lui les corps violés de femme sans défense. Les victimes s’enchaînent au rythme des cris qui alertent de l’acte infâme qui se joue. Des cris de victime qui rappellent un autre cri, celui du droit à la différence, le cri d’un mal-aimé, mit au ban d’un village (la société), un cri qui fait échos à tant d’autre. La cause et les conséquences. Si la différence du Bossu avait été accepté, aurions-nous connu ces catastrophes en chaîne ? Sous couvert d’un film fantastique, P. Ramlee interroge sur sa place dans la société et notre rapport à l’autre. Notre rapport au droit à la différence et non à l’indifférence. La Malédiction de l’Homme Huile, œuvre humaniste ?

I.D.

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