Après s’être fait remarqué pour ses travaux à la télévision ainsi qu’un premier long-métrage, The Secret (1979), un thriller inspiré d’un fait divers qui s’inscrit dans la Nouvelle Vague hongkongaise naissante, la cinéaste Ann Hui On Wah nous plonge pour son second dans une comédie (noire ?), un film d’opéra et de fantôme. Elle signe alors The Spooky Bunch / Xiaojie zhuang dao gui (1980) notamment produit par l’actrice Josephine Siao Fung Fung qui y tient également l’un des rôles principaux.
Une troupe d’opéra est invitée par un riche vieillard. Ce dernier veut que son neveu épouse l’actrice qui campe les seconds rôles. Ce mariage a pour but d’annuler une malédiction. Bientôt, la troupe se voit troubler par l’arrivée de plusieurs fantômes…
Sur un scénario de Joyce Chan Wan Man qui collabora avec Ann Hui par le passé, The Spooky Bunch se révèle être une œuvre de cinéma à part entière. La réalisatrice hongkongaise nous offre un spectacle mettant en exergue les superstitions. A travers une troupe de théâtre dont on découvre les coulisses avec exaltation, le film s’amuse à traiter des traditions et de leur place dans notre société moderne. Cette troupe d’opéra qui joue des pièces du folklore chinois réalise alors ce lien entre tradition et modernité. Très vite, les choses s’assombrissent lorsque deux des personnages doivent assumer un lourd passé. Ils doivent répondre des agissements de leurs ancêtres et parer à la vengeance d’une horde de fantôme. Entre message respectueux à l’encontre des traditions mais qui souligne aussi toute l’absurdité de la situation, The Spooky Bunch est un joyeux fourre-tout captivant mais également désagréable par moment. Une folie qui n’est pas toujours facile à ingurgiter entre un humour burlesque de circonstance mais surtout par son aspect grand guignolesque (amoncellement de mort violente). En effet, s’il s’avère une comédie fantastique gentillette au prime abord, The Spooky Bunch n’en est pas moins une œuvre sombre.
L’une des caractéristiques de ce second film d’Ann Hui c’est le développement de son histoire. La réalisatrice casse toute forme de linéarité et l’on s’amuse dès lors des rebondissements qui nous emporte dans un récit fou. Un bon point pour le scénario donc comme pour la mise en scène qui sait être intelligente et sobre sous ses airs « passe partout ». L’aura qui se dégage de l’ensemble que compose The Spooky Bunch est renforcé par l’excellent casting. Chaque acteur semble personnifier au mieux son personnage. On retiendra la malice toute en naïveté du personnage incarné par Josephine Siao. Un personnage haut en couleur qui ne cesse de manger tout le métrage, joueuse d’argent invétérée et par moment quelque peu écervelée. La bande de gamin que l’on trouve dans quelques scènes aussi donne à voir par la désinvolture dont ses membres font preuve, surtout le leader au crâne rasé. Ils participent à cette fraicheur distillée tout du long entre les péripéties d’un Chiang Kam et des autres membres de la troupe d’opéra (petite pensée à cette séquence de claques distribuées).
The Spooky Bunch est un divertissement singulier au charme certain, une pièce unique à la fois bordélique par son excentricité et terrifiante par la violence lugubre qui en découle. Un must see.
I.D.
4 commentaires:
Film "mineur" de Ann Hui, mais que j'ai adoré. Non pas pour l'histoire ou quoi, mais pour son aspect "documentaire" : cette façon de filmer une troupe de théâtre au quotidien, et ces image de l'île de Cheung Chau... Quelle nostalgie !
Johnnie To adore ce film aussi :)
Nous avons donc un point en commun avec Mr To ! ^^
Effectivement la vie même de la troupe qu'Ann Hui nous montre à l'écran est très intéressante jusque dans les rituels. Je me souviens surtout de la scène où le silence règne avant de monter sur scène et ce, à cause des fantômes.
Par contre, ayant quelque lacune en géographie, l'île de Cheung Chau ne me parle pas plus que ça.
C'est marrant j'avais pas accroché du tout... Et la vhs pourrie n'aidait pas non plus!
Cheung Chau c'est apparemment un spot à faire à HK qui dénote vraiment de ce que l'on peut cotoyer généralement à HK avec tous ces buildings (même si je les aime bine les buildings là-bas ^^). On doit mieux y respirer quand même! ^^
Parfois les conditions de visionnage joue beaucoup sur le ressenti du film (j'imagine fort bien la vhs pourrie^^).
Je me souviens avoir vu pas mal de personne quitter la salle lors de la projo'. Je peux comprendre que des personnes n'accrochent pas. L'une des raisons vient peut être du fossé culturel, je ne saurais dire. Il n'est tout de même pas facile d'approche à ce niveau-là.
Cheung Chau alors... eh bien si des fois je fais du tourisme dans le coin, il pourrait toujours être sympa de voir cet île en vraie ! :)
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